Passer au contenu
Un port d’attache pour les pédiatres. Une voix pour les enfants.

Les soins virtuels en période de pandémie : guide de télémédecine au cabinet du médecin

Affiché le 29 mars 2020 par la Société canadienne de pédiatrie | Permalink

Catégorie(s) : Perfectionnement professionnelCOVID-19

Par Raphael Sharon, MD, FRCPC, Conseil d’administration, Société canadienne de pédiatrie

Lorsque je suis entré à l’école de médecine aux Pays-Bas dans les années 1990, la biologie cellulaire et l’anatomie dominaient la première année. Nous n’avions aucune interaction avec des patients « vivants » avant la troisième année. J’étais très enthousiaste quand nous sommes devenus internes et que nous avons commencé à voir de vrais patients; je voulais tous les aider individuellement.

Quand je suis devenu pédiatre, mon travail est devenu encore plus amusant. Les interactions avec les enfants sont formidables. Ils sont d’une franchise brutale (« docteur, pourquoi vous n’avez pas de cheveux? ») et sont tellement reconnaissants quand vous les aidez à aller mieux. J’adore partir travailler le matin, sans savoir ce que la journée me réserve, quel problème ou quelle histoire je vais découvrir.

Cependant, au cœur de la pandémie, nous pratiquons la « distanciation sociale » (c’est-à-dire « une distance physique sans interactions sociales ») et nous voulons que tout le monde reste le plus possible à la maison. Nous demandons aux gens de s’isoler au retour d’un voyage ou en cas de maladie, ce qui est étrange pour les médecins, puisque nous avons le devoir de voir les patients malades. Les patients continuent d’avoir besoin de nous en cette période difficile, peut-être plus que jamais.

Comment soigner des patients que nous ne pouvons pas examiner? Indice : la télésanté ou la médecine virtuelle : nous pouvons orienter nos patients et leurs parents par téléphone ou visioconférence, grâce à des applications comme Zoom et Doxy.

Voici quelques éléments à retenir pour donner des soins virtuels dans votre pratique (mes exemples portent sur Zoom, puisque c’est ce que j’utilise dans ma pratique).

La prise d’un rendez-vous virtuel

Certaines applications, comme Zoom, vous permettent de planifier des rendez-vous virtuels. Les patients reçoivent un courriel contenant l’heure de leur rendez-vous et l’information pour se connecter à la visioconférence. Un membre de votre personnel peut demander au patient de télécharger la version la plus récente de l’application gratuite sur son téléphone intelligent, son ordinateur de bureau ou son ordinateur portable doté d’une webcaméra.

Le patient arrivera dans une « salle d’attente » virtuelle avant le début du rendez-vous. Quand vous serez prêt, vous pourrez l’admettre à la rencontre.

La prise de notes pendant un rendez-vous virtuel

J’ai demandé à mon infirmière d’assister avec moi aux rendez-vous virtuels. Je la présente et elle prend des notes. Je peux donc me consacrer entièrement au patient.

Si, en cabinet, vous avez l’habitude de prendre des notes tout en parlant à vos patients, assurez-vous de porter des écouteurs ou de mettre le téléphone sur « mains libres », car il est difficile de prendre des notes à une main.

Demandez la collaboration des parents pour l’examen physique

L’anamnèse complète demeure l’un des volets les plus importants de la médecine, que ce soit en cabinet ou en télémédecine. La visioconférence vous permet de procéder à une grande partie de l’examen physique, pourvu que les parents vous aident à gérer la caméra au moyen de leur téléphone intelligent.

  • Vous pouvez observer la coloration de la peau pour diagnostiquer un ictère ou une pâleur.
  • Vous pouvez observer les signes de troubles respiratoires d’un patient congestionné : s’il présente une tachypnée, un tirage sous-costal ou un battement des ailes du nez.
  • J’ai pu examiner la gorge d’un patient pour établir s’il avait les amygdales enflées ou le pharynx rougi ou si je constatais la présence d’exsudats.
  • Les enfants ont toutes sortes d’éruptions, causées par un virus, l’eczéma ou une réaction à un médicament. Elles sont visibles sur vidéo.

Qui voir encore en personne dans votre clinique

La vaccination systématique des enfants doit se poursuivre comme à l’habitude, car le report ou l’omission des vaccins prévus met les enfants à risque d’infections infantiles courantes à ne pas négliger, telles que la pneumococcie, la rougeole et la coqueluche. Il pourrait devenir prioritaire de prévoir des moments pour ce groupe. En effet, il est essentiel de maintenir des dossiers de santé exacts et à jour et de garantir le suivi des vaccins omis chez les enfants qui ont raté une dose prévue dans le cadre des programmes en milieu scolaire à cause d’une maladie ou de la fermeture de l’école. Certaines provinces offrent la vaccination au cabinet du pédiatre, tandis que d’autres organisent l’administration des vaccins dans des centres de santé publique.

Chaque pédiatre et chaque clinique devront prendre leurs propres décisions à l’égard des personnes qu’ils doivent ou peuvent voir en personne. Tenez compte de plusieurs facteurs, y compris l’accès à l’équipement de protection individuelle. Si votre clinique n’a pas accès à cet équipement, les règles suivantes doivent être envisagées pendant la pandémie de COVID‑19 :

  • Voir tous les nouveau-nés et les nourrissons jusqu’à l’âge de trois mois.
  • Voir les nourrissons de plus de trois mois en cas de risque de retard staturopondéral.
  • Voir les patients qui ont des symptômes infectieux seulement s’ils ont reçu des résultats négatifs au test de dépistage de la COVID-19.
  • Voir les patients asymptomatiques afin d’évaluer et de traiter leurs blessures, afin d’éviter une visite à l’urgence, dans la mesure du possible.
  • Toujours porter un masque et des gants pour rencontrer les patients (même s’ils sont asymptomatiques.

Dans les cliniques dotées d’équipement de protection individuelle, vous pouvez voir les patients indiqués ci-dessus, de même que les patients infectieux symptomatiques. Dans ce cas, il faut respecter les mesures suivantes :

  • S’assurer de faire porter un masque aux patients malades.
  • Porter l’équipement de protection individuelle pour voir les patients.
  • Dans la mesure du possible, donner rendez-vous aux patients malades à un moment distinct de la journée. Par exemple, faire les suivis réguliers le matin et rencontrer les patients malades en après-midi. Il est aussi possible de voir tous les enfants malades en fin de journée.

La préparation de votre clinique à un rendez-vous en cabinet pendant la pandémie de COVID‑19

  • Assurez-vous que votre personnel appelle le patient à l’avance pour s’informer de ses symptômes (écoulement nasal, toux, maux de gorge, fièvre ou essoufflement) ou de l’historique de ses voyages et pour vérifier s’il a été en contact avec une personne ayant reçu un test de dépistage positif à la COVID-19. N’oubliez pas de poser les mêmes questions à la personne qui accompagnera le patient.
  • Dans la mesure du possible, éliminez la salle d’attente. Si c’est impossible, espacez les chaises à deux mètres les unes des autres.
  • Escortez votre patient directement dans une salle d’examen à son arrivée pour qu’il se tienne automatiquement à l’écart des autres, y compris les membres de votre personnel.
  • Nettoyez soigneusement les lits d’examen, les surfaces, les poignées de porte (des deux côtés), les stylos, etc., après le rendez-vous de chaque patient.
  • Remettez les prescriptions et les demandes de tests aux patients dans la salle d’examen.
  • Demandez à vos patients d’appeler le cabinet plus tard pour planifier les rendez-vous de suivi, pour éviter qu’ils aillent près de la réception.

Les soins virtuels vous permettent de travailler de partout

Si vous êtes en quarantaine ou que vous devez rester à la maison pour une autre raison, les soins virtuels vous permettent de travailler à partir de chez vous. Voici quelques conseils pour que ça fonctionne :

  • Choisissez une pièce privée de la maison pour pouvoir vous concentrer dans votre travail et respecter la confidentialité du patient.
  • Habillez-vous toujours comme si vous étiez à la clinique. Il n’y a rien de plus embarrassant que de vous lever de votre chaise et de révéler que vous portez un pantalon de pyjama.

La COVID-19 oblige les médecins à relever des défis qu’ils n’auraient jamais pu prédire. Nous devons emprunter quelques leçons acquises lors de nos premières années à l’école de médecine, et travaillons avec des patients à une plus grande distance que celle à laquelle nous sommes habitués.

Heureusement, nous disposons des outils pour nous aider. Le nouveau défi consiste à apprendre le fonctionnement de ces outils et à acquérir des pratiques exemplaires. Considérez cette nécessité d’adaptation comme une prolongation de votre formation originale en médecine.

Restez en sécurité. Restez en santé.


Le Dr. Raphael Sharon est Professeur agrégé de clinique, département de pédiatrie, à l'université de l’Alberta

Si vous vous posez des questions sur les aspects médicolégaux des soins virtuels en temps de pandémie, consultez le site Web de l’Association canadienne de protection médicale.


Droits d'auteur

La Société canadienne de pédiatrie est propriétaire des droits d'auteur sur toute l'information publiée dans le présent blogue. Pour obtenir toute l'information à ce sujet, lisez la Politique sur les droits d'auteur.

Avertissement

L’information contenue dans le présent blogue ne devrait pas remplacer les soins et les conseils d’un médecin. Les points de vue des blogueurs ne représentent pas nécessairement ceux de la Société canadienne de pédiatrie.

Mise à jour : le 20 avril 2020