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L’enfance dure toute la vie : l’importance d’investir dans la petite enfance

Affiché le 16 février 2015 par la Société canadienne de pédiatrie | Permalink

Catégorie(s) : Défense d’intérêts

La docteure Robin Williams, présidente désignée de la SCP, a donné une allocution à la Conférence sur l’innovation pour la santé de l’enfant et de la famille organisée par les Instituts de recherche en santé du Canada. Des cliniciens, des chercheurs, des philanthropes, des sommités du milieu des affaires et des spécialistes des politiques, qui se sont penchés sur les enjeux complexes liés à l’état de santé des enfants et adolescents canadiens, y ont participé. La docteure Williams tire quelques réflexions de sa présentation.

En qualité de pédiatre en exercice dans les années 1980, je me concentrais généralement sur les paramètres physiques de la « santé » : taille et poids, étapes du développement moteur et un peu d’orthophonie. C’est ce que faisaient la plupart des cliniciens à l’époque.

De nos jours, ces aspects ne suffisent plus.

Nous savons désormais que, pour se développer de manière optimale, les enfants ont besoin d’un attachement solide : des bras pour chaque bébé et au moins un adulte pour adorer chaque enfant. Pour bien des parents, un attachement solide est plus facile à établir par l’allaitement : le toucher, la chaleur, les chants, les taquineries, le bercement et les interactions face à face.

Les recherches en neurosciences réalisées dans des établissements comme le Center on the Developing Child de l’Université Harvard, nous en ont beaucoup appris sur le cerveau en développement :

  • Le cerveau se développe au fil du temps, de bas en haut.
  • Les gènes et l’expérience se conjuguent pour modeler le cerveau en développement.
  • La capacité de changement du cerveau diminue au fil des ans.
  • Les capacités cognitives, émotives et sociales sont intimement liées tout au long de la vie.
  • Le stress toxique endommage le cerveau en développement et peut causer des problèmes de santé dans les volets de l’apprentissage, du comportement et de la santé physique et mentale, qui persistent pendant la vie entière.

Quel rôle joue donc l’enfance sur la santé tout au long de la vie? Nous ne devons plus nous concentrer uniquement sur les déterminants physiques de la santé. De plus en plus, nous devons plutôt nous attarder sur un solide départ sur les plans social et affectif, afin que les enfants s’épanouissent pleinement.

Les enfants vivent dans un contexte familial. S’ils ont un bon départ, ils acquièrent toute une série de facteurs protecteurs qui influeront sur leur état de santé tout au long de leur vie.

Autrement dit, l’enfance dure toute la vie.

L’Adverse Childhood Experiences Study, une étude menée en anglais, démontre clairement ce concept. Les résultats exposent le lien entre les mauvaises expériences de la petite enfance (telles que la maltraitance, la négligence et le dysfonctionnement familial) et les carences sociales, affectives et cognitives, l’adoption de comportements de santé à risque, les maladies, les invalidités, les problèmes sociaux et même les décès prématurés.

De même, les travaux de feu le docteur Clyde Hertzman démontraient le lien entre les expériences difficiles de la petite enfance et des problèmes de santé comme la dépression et l’anxiété, la consommation de substances psychoactives, l’obésité, l’hypertension, les cardiopathies et les signes de vieillissement prématuré à l’âge adulte.

De toute évidence, le fait d’investir dans l’enfance a des avantages non seulement sur les enfants et les familles, mais également sur l’ensemble de la société d’aujourd’hui et de demain.

Quel est donc le portrait du Canada en matière d’investissements dans l’enfance?

Dans le dernier Bilan Innocenti de l’UNICEF, le Canada se situe au 17e rang des 29 pays industrialisés dans cinq dimensions. Le document d’accompagnement (Canada) du Bilan Innocenti 11 de l’UNICEF, le bien nommé Coincé au milieu, détaille ce classement.

Dans l’ensemble, le Canada est bel et bien coincé au milieu du classement. Certains résultats, qui nous situent parmi les derniers, sont toutefois plus préoccupants :

  • Pauvreté relative des enfants : 21e pays sur 29
  • Mortalité infantiles : 22e pays sur 29
  • Vaccination : 28e pays sur 29
  • Éducation secondaire : 24e pays sur 29
  • NEET (ni étudiants, ni employés, ni stagiaires) : 22e pays sur 28
  • Surpoids : 27e pays sur 29
  • Consommation de cannabis : 29e pays sur 29
  • Taux national d’homicides : 22e pays sur 29
  • Intimidation : 21e pays sur 29

Que faire pour améliorer la situation?

Il serait bien de commencer par mettre un terme à la pauvreté relative.

En fait, un enfant qui habite au Canada est plus susceptible de vivre dans la pauvreté qu’une personne de plus de 65 ans.

Selon le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, l’environnement socio-économique a une incidence de 50 % sur l’état de santé.

Les enfants autochtones sont encore plus vulnérables que la plupart des enfants canadiens, car ils n’ont pas nécessairement accès aux services essentiels que nous tenons pour acquis, comme l’eau potable, un logement convenable ou l’accès facile à l’éducation et aux soins médicaux.

Si on mettait un terme à la pauvreté, les enfants canadiens mèneraient une vie complètement différente. Pour y parvenir, il faut plus d’argent, plus de données (de mesures) et une plus grande collaboration entre les professionnels de la santé, les chercheurs, les décideurs et les organismes sociaux.

Ces trois investissements essentiels changeraient la situation des enfants du Canada et nous permettraient de favoriser leur développement et leur bien-être dès la petite enfance, réduisant ainsi le risque de problèmes de santé à l’adolescence et à l’âge adulte.

 


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Mise à jour : le 30 mars 2016